Dans la grande nuit des temps, d'Antonio Muñoz Molina.
Je ne sais pas comment démarer cette chronique tant ce roman est riche, complexe et difficile à raconter. Avant de vous donner mon avis, je vais peut-être vous donner un petit résumé de pavé de 1000 pages pour que vous puissiez vous faire une petite idée dessus.
"En 1936, Ignacio Abel, architecte de talent espagnol, progressiste et républicain, se retrouve dans une gare de Pennsylvanie après un long périple à travers l'Europe afin de fuir son pays en pleine guerre civile. Ce fils de maçon devenu architecte suite à de nombreux sacrifices et un mariage bienheureux avec la fille d'une riche ancienne famille bourgeoise de Madrid, cherche dans cette gare son amour perdu : Judith Biely, sa maitresse américaine qui l'a quitté quelques mois plus tôt. Ignacio Abel est un homme tourmenté, totalement bouleversé par cette passion amoureuse dévorante et par les drames que traversent son pays d'origine. Cette guerre le place dans une situation inconfortable finnancièrement et brouille le futur, qui aurait dû être brillant, de ses enfants, Lita et Miguel."
Comme je vous le disais, ce roman "fleuve" est assez complexe car le contexte historique énnoncé par l'auteur est assez méconnu du grand public et peu d'informations sont données dans le roman. Même si je ne l'ai pas fait avant ma lecture, je ne saurais trop vous conseiller que de faire quelques recherches sur cette période avant de commencer votre roman. Cependant même si le lecteur peut être gêné au début du livre, cette méconnaissance du contexte n'empêche de comprendre tout l'aspect "romanesque" de l'intrigue. De plus, la construction du récit est assez difficile à suivre, car nous suivons le récit d'Ignacio dans le temps présent (lorsqu'il est en Amérique) mais aussi dans le passé. L'auteur utilise donc de nombreux retour dans le passé et perd parfois son lecteur, s'ajoute à cela de très nombreuses descriptions des sentiments, des lieux, des personnages, des situations qui sont très riches, denses, foisonneuses, précises et subtiles. Ces descriptions occupent une très grande partie du roman alors que les dialogues, tels des stichomyties dans la tragédie classique, montrent une réelle tension entre les personnages, elles permettent au lecteur de relacher l'attention. Je regretterai par contre quelques longueurs qui auraient pu être évitées.
J'ai été particulièrement frappée par le fabuleux travail de traduction fournit par Philippe Bataillon et je pense que la version originale doit être absolument incroyable (je regrette amèrement de ne pas avoir étudié l'espagnol !). Je tiens donc à lui rendre hommage pour cette traduction hors normes qui permet de nous faire découvrir un auteur tel que Molina avec un véritable style d'écriture qui marque les esprits.
Pour conclure, je conseillerai ce livre à des lecteurs aguerris, n'ayant pas peur de ces imposants "pavés", des lecteurs appréciant les romans complexes, originaux, foisonnants, riches et dont on en ressort grandit. C'est une lecture marquante que je vous conseille de lire au plus vite !
Cette lecture s'inscrit dans le cadre de plusieurs challenges : tout d'abord le challenge de Brize "Le pavé de l'été", puis le challenge de Elora sur "Les pays hispanophones" et enfin le challenge de George "Cartables et tableaux noirs saison 2" car même si je ne l'ai pas dit une grande partie de l'intrigue tourne autour de la cité universitaire de Madrid ainsi que du Burton College et le personnage de Judith Biely est une doctorante en littérature espagnole.